l'ambroisie

ambrosia artemisiifolia and co

       Il y a peu de plante aussi mal aimée que l'ambroisie, et les allergies, parfois graves, qu'occasionne son pollen n'y sont pas pour rien. Elle est amplement décrite pour responsable de nombreux maux, justifiant des campagnes d'éradication à l'échelle internationale.

         Force est de constater qu'elle prend une place de plus en plus importante lors des dernières décennies et que son expansion n'est pas prête de s’arrêter malgré la guerre qui lui est déclarée. 

          Et si nous prenions un temps pour la reconnaitre vraiment ( elle est trop souvent confondue avec notamment l'armoise vulgaire) et tenter un peu de la comprendre. Peut-être n'est-elle pas aussi fautive que semble nous montrer les apparences.

reconnaitre l'ambroisie

        De part le monde on retrouve une quarantaine d’espèces d'Ambroisie, seules quatre d'origine américaine se retrouvent sur le continent Européen. Ainsi, en France, on rencontre communément Ambrosia arthémisiifolia ( Ambroisie à feuille d'armoise) ainsi que, bien que beaucoup plus rarement, trois de ces cousines: Ambrosia trifida ( "grande herbe à poux", très grande, allant de 2 à 6m de hauteur) , Ambrosia coronopifilia ( elle aussi appelée "herbe à poux", vivace) et Ambrosia tenuifolia ( petite herbe à poux, elle aussi vivace) . Je ne prendrais pas le temps ici de décrire ses cousines, étant donné que vous avez peu de chance de les rencontrer , mais , pour les curieux vous pourrez vous rendre sur Wikipédia ou sur Flore Alpes en cliquant sur le lien ci-après avec les photos pour en savoir davantage).

Une espèce d'Ambroisie, Ambrosia maritima , est présente , bien que sporadiquement , naturellement en France sur les littorales du sud de la France et en Corse.

 

      Les ambroisies font parti de la grande famille des astéraceaes, mais elles possèdent la spécificité d'être monoïque, c'est à dire que sur un pied vous aurez des capitules femelles ( vers le bas de la plante) et des capitules mâles (vers le haut de la plante)

     L'ambroisie à feuille d'Armoise, est une annuelle , estivale qui meure dès les premiers gels. Sa floraison à lieu d'Août à Octobre, avec un pic en Septembre, certain d'entre vous l'auront d’ailleurs bien remarqué. Ses feuilles, d'un beau vert  sur les deux faces, sont finement découpées et sentent une odeur proche de l'encens lorsqu'on les froissent entre les doigts. Elle est très largement ramifiée et peut atteindre 2 m de haut. Néanmoins elle tourne communément autours des 1 m et il n'est pas rare de constater des floraisons sur les pieds de même pas une vingtaine de cm de hauteur. Sa tige est velue et souvent rougeâtre.

 

      Cela permet de mettre en avant des différences avec l'armoise commune avec qui elle est si souvent confondu. L'armoise commune possède des feuilles d'un vert sombre sur le dessus et d'un gris argenté sur le dessous et est hermaphrodite (capitules possédant des fleurons et mâle et femelle) .

Armoise commune au pied de renouée du japon
Armoise commune au pied de renouée du japon

l'ambroisie, histoire et écologie

       Malgré les apparences ont ne retrouve pas cette mal aimée "partout", et il est important d'observer plus attentivement si nous souhaitons la comprendre un peu. Ainsi, en y regardant de plus près, on remarque qu'on la retrouve essentiellement dans les grandes monocultures (affectionnant particulièrement le maïs et tournesol, mais pas que) , derrière les gros travaux BTP, sur les bordures de route... Elle peut parfois suivre de manière très strict les limites de champs poussant à foison d'un coté et quasi inexistante de l'autre ( étrange n'est-il pas?).

 

      L'Ambroisie à feuille d'Armoise est originaires des plaines d'Amérique du Nord et, selon Gérard Ducerf, plus particulièrement des zones sableuses désertiques à semi-désertique. Pour Thierry Thévenin, se serait davantage proche des habitations, des lisières forestières et les pâturages intensifs qu'elle grandirait spontanément dans son aire d'origine.  Quoi qu'il en soit elle pousse dans des zones où l'humus se fait pauvre , où les sols sont dénudés ou clairsemés par le surpâturage. C'est une pionnière qui permet à la terre de se recouvrir lorsque peu d'autres plantes y poussent.

       L'ambroisie est arrivée par vagues successives sur le territoire Français. Elle est attestée comme plante de collection dès le XVIII ème siècle, en profitant pour s'installer sporadiquement dans la vallée du Rhône, et plus particulièrement dans l'Allier. Cependant c'est après la première guerre mondiale qu'on constate une première vague d’expansion. Les botanistes la répertorie dès lors à l'état spontanée sur les côtes Normandes, dans les dunes sableuse. Ses graines ont ensuite été importées en masse dans les semences (notamment de trèfles) importées des États Unis lui permettant de prendre largement sa place sur le territoire français, surtout dans la vallée du Rhône. La deuxième guerre mondiale n'a fait que renforcer cet effet. En cela on la qualifie d'obsidionale, c'est à dire comme flore marquant les anciens lieux de passage des guerres et de l'armée, devenant un séquelle environnemental.

 

       Cela dis les échanges avec les États Unis sont bien plus anciens et il ne serait pas surprenant que d'autres graines soient arrivées par chez nous depuis bien plus longtemps .

      J'aimerai rappeler que les graines possèdent une capacité de dormance, c'est à dire quelles peuvent rester dans le sol, sans germer, en attendant que les conditions leur soit favorables. Chaque plantes à des besoins spécifiques et donc des critères de levée de dormance qui lui sont propre. Aussi vous avez peu de probabilité de faire germer une noix de coco dans votre jardin, même avec beaucoup d'amour. Les graines peuvent ainsi être conserver dans le sol pendant plusieurs années voir plusieurs milliers d’années dans des cas très spécifique. Des scientifiques on ainsi fait germer avec succès des graines de lotus de plus de 5 000 ans. On a aussi réussi à réveiller certaine graines de silène conservées dans les sous sols des goulag Russes qui avaient plus de 30 000 ans. Cela offre au  sol et à la nature la capacité de pouvoir s'adapter face à tout changements.

 

        C'est pourquoi je souligne que, pour que l'Ambroisie se développe, il faut non seulement que des graines soient importées mais aussi qu'elles trouvent des conditions optimales pour germer. En bref c'est aussi parce ce que les conditions s'y prêtent que la plante pousse. Pour l'Ambroisie cela signifie que les guerres ainsi que la mondialisation, les pratiques agricoles intensives les lourds travaux en BTP ont suffisamment transformé notre territoire pour lui permettre de pousser.

L'Ambroisie, cause ou conséquence?

       Les allergies que son pollen déclenche, ainsi que sa propension à prendre une place non négligeable dans notre paysage, ont fait que nous avons déclarer une véritable guerre contre l'Ambroisie. Mais pourtant n'est-t-il pas possible de la voir autrement que comme nuisible?

 

       On ne peut effectivement pas enlever les soucis de santé , parfois très importants, qu'elle occasionne, devenant un problème de santé publique. En douze ans, le taux d'allergie en vallée du Rhône à doublé , entrainant des désordres sanitaires de grande envergure. Ces allergies touchent essentiellement la sphère respiratoire : conjonctivite, toux sèches , asthme... et peut parfois aller jusqu’à des réactions localisées sur la peau de type rougeur, œdème et urticaire. 

Les pollinoses qu'elle occasionne coûtent entre douze et vingts millions d'euros par an à la sécurité sociale. Pas étonnant dès lors qu'on lui déclare la guerre. 

 

       Cependant, on peut noter une corrélation importante entre les allergies et le taux de pollution. En effet, il à été démontré que l'augmentation du taux de CO2 dans l'atmosphère entrainait une augmentation de la production de pollen chez l'Ambroisie (actuellement de 130% par rapport à l'aire pré-industrielle). De plus, même si les corrélations de cause à effet ne sont pas toujours évidentes à mettre en lumière dans ce domaine, il a été démontré (entre autre par la faculté de médecine de Lyon) que les régions les plus polluées sont aussi celles où l'on enregistre le plus fort taux d'allergie. Certain gaz comme de dioxyde de souffre, le monoxyde carbone, l'ozone... fragilisent la parois des muqueuses, favorisant, voir renforçant, les états allergiques. Ils auraient même pour certain la capacité de déformer, voir de fractionner, les grains de pollen de l'Ambroisie, leurs permettant d'entrer plus en profondeur dans notre organisme.

A ce propos, il est à noté que l'Ambroisie n'a pas développé, et ce durant des milliers d'années, d'allergie sur son aire d'origine. Les amérindiens l'ont même utiliser pour de nombreux emplois médicinaux, tinctoriales ( les graines offrent une teinture rouge) voir culinaires. Elle aurait même été cultivée dans des temps anciens! 

 

       De plus elle se développe, comme sur son aire d'origine, sur les zones où les autres plantes peinent à pousser. Ainsi c'est là où les monocultures intensives, avec l'épandage de pesticide, engrais chimiques et autre produits phytosanitaires, les lourds travaux de BTP... déstructurant profondément les sols qu'on la retrouve en grande quantité. Ce phénomène est renforcé par sa très grande résistance aux herbicides. Pour Gérard Ducerf, elle se présente comme une indicatrice de la désertification de nos sols et de leur appauvrissement en humus. Les campagne d’arrachage et autres se montrent clairement inefficaces, voir ayant un effet opposé au résultat souhaité. l’Ambroisie n'a de cesse de se propager. Si l'on en revient au fait qu'il s'agit d'une plante pionnière, couvrant les sols pauvres et déstructurés, on comprendre aisément que les seul cas de recul de l'Ambroisie observés ont eu lieu lorsqu’il y a eu un travail de refertilisation des sols. L'Ambroisie ne supporte effectivement que très mal la concurrence d'autre espèces dont la croissance est favorisée par un sol riche et vivant. N'oublions pas par ailleurs que les intrants chimiques épandus dans les champs ne sont ni plus ni moins que les différents gaz utilisés pendants la premières guerre mondiale contre l'ennemie. Là encore l'Ambroisie montre du doigt un système agressif envers le vivant , ne permettant pas de conserver et favoriser la fertilité de nos sols.

 

      Est ce que ces observations vont nous permettre une remise en questions de notre système de fonctionnement et de production? Il est souvent bien plus facile de designer un coupable que de se remettre en question pour regarder la cause du problème. L'Ambroisie a encore de beaux jours devant elle!

 

     Je vous conseil vivement la lecture du livre de Thierry Thévenin "Les plantes du chaos , et si les pestes végétales étaient des alliées?" pour approfondir encore

D'autres piste de réflexions

      Je trouve questionnant que le mot "guerre" soit si souvent rapproché de l'ambroisie , que ce soit par l'histoire de son introduction ou par le combat qu'on lui mène aujourd'hui.D'autant plus le mot " ambroisie", vient du grec "ambrosios" qui signifie immortel, divin, qui appartient aux Dieux. Dans la mythologie l'ambrosios était une substance divine servant de nourriture et de soin pour les Dieux ( sans laquelle il ne pourrait pas vivre ) . Un autre lien la rattachant à la guerre a était fait par des somatopathes: certains se sont rendu compte que les personnes souffrant de très fortes allergies avait aussi dans leurs lignées des ancêtres gazés au gaz moutarde ou dans les camps de concentration. Peut-on dire qu'il y en a tellement dans nos lignées que l'on ne peut pas y voir de rapport? Ou y voir une étrange coïncidence? Je ne saurait trancher. Je constate juste qu'elle a le mérite de ne pas se faire oublier face à la mondialisation et à la guerre parfois inconsciente que notre système de fonctionnement déclare au vivant. A défaut de la comprendre, on la remarque !

 

       J'entends aussi beaucoup dire, qu'elle n'a pas d'utilité particulière sur le territoire au niveau écologique, qu'elle ne possède pas de prédateur naturel ( même si les ovins peuvent la consommer en fourrage) ni hôte qui lui soit inféodé. Elle serait juste envahissante, profitant de circonstances. Cependant comment ne pas lui voir un rôle prépondérant qu'est celui de garder du vivant quand celui ci n'a plus sa place?

 

bibliographie (non exhaustive)

DUCERF G., l'encyclopédie des plantes bio-indicatrice alimentaires et médicinales, volume 1, édition promonature p.93

THEVENIN T. Les plantes du chaos, et si les pestes végétales étaient des alliées, édition vieilles racines et jeunes pousses

FOURNIER P-V. Dictionnaire des plantes médicinales et vénéneuse de France, édition Omnibus

 Florealpes.com

Wikipédia: l'ambroisie